1. Comment avez-vous décidé de créer la DS ?

À peine avions-nous achevé le développement du Game Boy Advance que nous commencions déjà à réfléchir aux projets suivants. L’un de ces projets a débouché sur le Game Boy Advance SP, un autre a vu le jour sous la forme de la Nintendo DS.

2. Quels objectifs avez-vous cherché à atteindre en concevant la DS ?

Comme pour toutes les consoles sur lesquelles nous avons travaillé jusqu’à présent, nous voulions créer quelque chose d’innovant. S’agissant de la Nintendo DS, quand nous avons commencé à concevoir le projet, je réfléchissais à la compatibilité avec les logiciels du Game Boy Advance et à la possibilité d’afficher des graphismes améliorés en 3D. Dès lors, et jusqu’à la fin du projet, nous avons eu différentes idées, qui ont été soit adoptées, soit abandonnées. Pour ne rien vous cacher, j’avais moi-même eu l’idée de l’écran tactile au début du développement, mais je ne pensais pas que nous la reprendrions sur ce projet. Au final, avec son double écran, dont un tactile, sa fonction de reconnaissance vocale et ses possibilités de communication sans fil, la Nintendo DS est devenue une console absolument novatrice, comme il n’en existe aucune autre.

3. Quel est l’intérêt du double écran ?

En termes de gameplay, le double écran offre des possibilités énormes. D’une part, le joueur n’est plus obligé de quitter l’écran de jeu pour consulter les informations importantes, comme les cartes ou la liste des objets en sa possession. Il est donc assuré de pouvoir jouer sans temps mort. D’autre part, les deux écrans permettent également de disposer d’un champ de jeu deux fois plus étendu. Mais en plus de ces avantages pratiques, il faut dire que c’est grâce au double écran que nous avons pu introduire l’écran tactile, autre grande nouveauté de la Nintendo DS. Comme je vous le disais à l’instant, je ne pensais pas au départ que nous adopterions l’idée d’un écran tactile sur ce projet. Et puis je me souviens que c’est M. Hiroshi Yamauchi, l’ancien président de Nintendo, qui a lancé l’idée d’un double écran. Nos créateurs m’ont alors dit que si l’un de ces deux écrans était tactile, cela leur permettrait de créer des possibilités de jeu sans précédent, une façon de jouer innovante. Autre aspect important, le double écran est véritablement unique : il n’existe sur aucune autre console, ce qui fait de la Nintendo DS un produit très séduisant pour le consommateur.

4. En quoi avez-vous influé sur le développement de cette console ?

J’ai été profondément impliqué à chaque stade du développement et dans tous les processus de prise de décision majeurs.

5. Comment avez-vous eu l’idée d’utiliser l’écran tactile en tant que commande de jeu ?

Comme je vous le disais à l’instant, le concept d’écran tactile est devenu une option envisageable à partir du moment où nous avons pensé utiliser un double écran. Nos développeurs, de jeux mais aussi de consoles, réfléchissent beaucoup à l’interface utilisateur. Comme nous tenions vraiment à avoir une interface parfaitement nouvelle, l’écran tactile était une idée très séduisante. Nous nous sommes alors rendus compte qu’en dotant l’écran du bas d’une fonction tactile, nous pourrions en faire une sorte de « manette » programmable, ce qui étendrait à l’infini le potentiel de cette interface.

6. En quoi cet écran tactile enrichit-il l’expérience de jeu pour le joueur ?

En l’occurrence, il faut le toucher pour le croire ! C’est une sensation parfaitement nouvelle, que vous n’avez que sur la Nintendo DS. Par ailleurs, comme je vous le disais, les développeurs de jeux peuvent programmer les commandes du jeu sur cet écran tactile à leur guise, ce qui veut dire qu’en fonction du contenu du jeu, ils peuvent attribuer les boutons et les commandes comme bon leur semble. Ils ne sont plus tenus par une configuration prédéterminée.

7. Comment avez-vous eu l’idée de l’utilisation du micro (par exemple le fait de souffler dedans) comme commande de jeu ?

C’est moi qui ai proposé l’idée d’un micro intégré. Comme vous le savez peut-être, la version japonaise d’origine de la console Nintendo Entertainment System (NES) était équipée d’un micro sur l’une des commandes. Mais comme ce micro n’était pas d’une très grande qualité, il n’a pas été utilisé très souvent par la suite, alors que de mon côté, je trouvais l’idée intéressante. Lorsque j’ai proposé qu’il y ait un micro sur la Nintendo DS, j’ai d’abord rencontré quelques oppositions, mais j’ai convaincu tout le monde en leur disant que les micros sont devenus si peu chers et si miniaturisés que cela n’influerait ni sur la taille, ni sur le coût de production de la Nintendo DS. Pour tout vous dire, nos développeurs de jeux ont eu encore quelques réticences au début, mais ensuite ils ont trouvé l’idée très intéressante…

8. De quel élément de la DS êtes-vous le plus fier ?

S’il fallait n’en retenir qu’un seul, je choisirais la possibilité de communication sans fil, car c’est une fonction que nous avons passé beaucoup de temps à développer. Personnellement, j’ai hâte de voir à l’œuvre cette fonction multijoueurs sans fil entre les mains des joueurs. Grâce aux jeux utilisant cette capacité que développent nos équipes, les joueurs vont découvrir de nouvelles sensations.



9. Y a-t-il un élément du concept d’origine que vous ayez choisi de ne pas utiliser et pourquoi ?

Nous avions envisagé la possibilité d’intégrer un joystick analogique, mais l’idée a été abandonnée lorsque nous avons décidé de doter l’écran du bas d’une fonction tactile : jamais un petit joystick n’aurait pu rivaliser !

10. De combien de personnes se composait l’équipe qui a développé la DS ?

Je ne saurais pas vous le dire précisément, car c’est un projet immense, qui ne s’est pas limité à mon département de recherche et ingénierie, mais qui a aussi impliqué l’EAD et de nombreux autres. Grosso modo, je dirais qu’environ 200 personnes ont travaillé dessus chez Nintendo.

11. Quel public cible aviez-vous en tête pendant la conception de la DS ?

Moi-même (rires) ! Je me suis mis dans la peau du joueur : si je devais acheter cette console, à quoi faudrait-il qu’elle ressemble, comment aimerais-je l’avoir en main ? S’agissant de l’interface utilisateur, nous avons surveillé les choses de très près afin que la Nintendo DS convienne aussi bien à un joueur enfant qu’à un adulte.

12. Qu’est-ce qui fait de la DS un produit à part et unique ? En un mot, pourquoi l’acheter ?

Tout simplement pour l’expérience interactive sans précédent qu’elle vous procure ! Elle vous fait découvrir une nouvelle façon de jouer, c’est une sensation qu’aucune autre console ne peut vous offrir.

13. Sur quels projets avez-vous travaillé avant la DS et en quoi vous ont-ils influencé dans votre travail ?

J’ai participé au développement des consoles portables Game&Watch, Game Boy, Game Boy Color, Game Boy Advance et Game Boy Advance SP et j’ai travaillé aussi sur les systèmes Robot et Light Gun sur NES. En dehors du savoir-faire et de l’expérience que j’en ai retiré, les technologies appliquées à la batterie rechargeable ou au mécanisme d’articulation du Game Boy Advance SP nous ont par exemple beaucoup aidé lorsqu’il a fallu faire des choix sur des fonctions similaires pour la Nintendo DS. Nous avons également tiré des enseignements de l’adaptateur pour communication sans fil du GBA pour concevoir les fonctions de communication sans fil de la Nintendo DS.

14. En quoi consiste une journée de travail type pour vous ?

L’essentiel de mes journées de travail se passe en réunions. Quand je ne suis pas en réunion pour faire des choix sur le développement d’un produit, j’aime rencontrer différentes sortes de gens, au sein de Nintendo ou en dehors. J’essaie constamment de me tenir informé sur les tendances et l’air du temps.

15. Pourquoi avez-vous opté pour un design radicalement nouveau par rapport aux anciennes consoles portables de Nintendo ?

Nous cherchons constamment à innover dans le design extérieur, mais pour ce qui est de la Nintendo DS, nous avons surtout été guidés par un impératif de fonctionnalité. N’oubliez pas que nous voulions avoir un double écran, dont un tactile, un micro, une entrée pour les logiciels du GBA et en même temps créer la console la plus compacte qui soit tout en maximisant son ergonomie. C’était un cahier des charges extrêmement contraignant et nos designers ont fait un travail remarquable !